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Reges sunt vassali Ecclesie. Le pouvoir temporel selon Thomas d’Aquin

Jean-Paul Boyer

Jean-Paul Boyer, "Reges sunt vassali Ecclesie. Le pouvoir temporel selon Thomas d’Aquin", dans Rives nord-méditerranéennes, n° 19, année 2004.

Extrait de l’article

« Ce glorieux docteur a le plus illuminé l’Église de Dieu après les apôtres et les premiers docteurs ».

Voici, selon le résumé d’un témoin, une déclaration de Jean XXII pour la canonisation, en 1323, de Thomas d’Aquin (+ 1274). Le pape sanctifiait une doctrine avec l’homme. Théocrate convaincu, il la promouvait au service du « grand projet de réunification culturelle et politique », rêvé dès longtemps par l’Église romaine. Sur ce plan, il ne croyait pas seul aux mérites du thomisme. Je rappelle sa large utilisation par des partisans de la théocratie pontificale, dans ses versions radicales, comme Jacques de Viterbe ou Alvaro Pelayo. À la tête du parti guelfe­, la monarchie « angevine » de Sicile-Naples se réclamait pareillement de Thomas. Cette prétention s’étalait au grand jour. Le roi Robert (1309-1343) imaginait, par exemple, trouver un argument définitif contre l’empire dans une dénonciation de l’ancienne barbarie germanique par le docteur angélique.

Rangé du côté opposé à la ligue pontificale, guelfe et angevine, l’Alighieri vénérait autant le docteur commun. Sa pensée ne se confondait pas avec le thomisme. Ce nonobstant, il regardait Thomas d’Aquin comme un maître. Je répéterai la conclusion d’Étienne Gilson : « L’attitude de Dante à l’égard de la philosophie présuppose l’existence même du thomisme. » Le docteur angélique tenait aussi le premier rang parmi les théoriciens dont s’inspirait le dominicain Jean de Paris, dans son Tractatus de potestate regia et papali. Fût-ce avec modération, ce traité épaulait Philippe le Bel face à Boniface VIII. Je mentionnerai encore tel libelle de Pierre Dubois, également écrit pour soutenir Philippe IV et dirigé, cette fois, contre Clément V. Le publiciste dénonçait, à son propos, le péché mortel d’acception des personnes. Il en appelait à « frère Thomas de Aquin ».

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